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La décision de Paramount Networks France de fermer Game One à la fin du mois de novembre 2025 a suscité une émotion particulière chez de nombreux passionnés. Née en 1998, cette chaîne télévisée emblématique a accompagné plusieurs générations de joueurs et de joueuses, participant activement à la reconnaissance du jeu vidéo dans la culture populaire française. Sa disparition symbolise bien plus qu’une simple réorganisation médiatique : elle révèle les défis persistants auxquels fait face l’industrie pour faire du jeu vidéo une discipline pleinement respectée et soutenue.
Game One a été lancée le 7 septembre 1998, à une époque où le jeu vidéo était encore considéré comme un loisir d’enfant. En s’imposant comme la première chaîne française entièrement dédiée à cet univers, elle a contribué à changer cette perception. Des émissions comme Level One ou Retro Game One ont permis à des millions de spectateurs de découvrir le jeu autrement, à travers la passion, l’analyse et la culture.
Mais Game One ne s’est pas limitée aux jeux vidéo. La chaîne a aussi joué un rôle central dans la démocratisation de la culture geek en France. En diffusant des séries animées japonaises, des émissions sur les mangas, les films cultes et les univers de science-fiction, elle a permis à toute une génération de s’ouvrir à un imaginaire riche et varié. Cette mise en avant de la culture geek a profondément influencé la perception du grand public, participant à rendre cette culture plus accessible et plus respectée.
Game One a aussi contribué à populariser la culture geek à grande échelle. Grâce à ses programmes variés, la chaîne a aidé à légitimer des univers longtemps considérés comme marginaux. Elle a fait le pont entre le grand public et les passionnés, permettant à des millions de personnes de s’identifier à une culture autrefois stigmatisée.
Après plus de 25 ans d’existence, Paramount Networks France, dans un contexte de fusion entre Paramount Global et Skydance, a décidé d’arrêter la diffusion de la chaîne. Un choix stratégique plutôt qu’économique, puisque Game One était encore rentable avec plus de deux millions d’euros de bénéfices nets par an.
Cette décision illustre un phénomène plus large : la disparition progressive des médias traditionnels au profit des plateformes numériques. YouTube, Twitch ou encore les services de streaming à la demande ont modifié les habitudes de consommation. Le public du jeu vidéo ne regarde plus la télévision linéaire ; il consomme du contenu quand il le souhaite, où il le souhaite.
Le jeu vidéo a toujours été à la pointe de la technologie et de l’innovation. Pourtant, l’arrêt de Game One rappelle que les structures médiatiques classiques n’ont pas su évoluer assez vite pour s’adapter à ce nouveau paysage digital. Là où les créateurs indépendants, les streameurs et les youtubeurs ont su conquérir des millions d’auditeurs, des chaînes historiques peinent à trouver leur place.
Ce paradoxe est frappant : alors que le jeu vidéo est aujourd’hui reconnu comme une forme d’art, un vecteur de narration et un secteur économique majeur, les entreprises et institutions traditionnelles peinent encore à lui accorder une place stable et pérenne dans leurs stratégies. L’arrêt de Game One ne relève pas d’une perte d’intérêt du public, mais d’une méconnaissance de la manière dont cette passion s’exprime et évolue.
Pendant la période du COVID, beaucoup de personnes qui auparavant se tenaient à l’écart des jeux vidéo ont fini par essayer et tomber amoureuses de ce média. Cette période, certes sombre, a marqué un tournant : de nouveaux utilisateurs, des curieux et des familles entières ont découvert un loisir capable de rassembler et de créer des liens. Elle a contribué à accélérer la reconnaissance du jeu vidéo comme un moyen d’expression et d’évasion universel.
Aujourd’hui, les jeux sont considérés comme de véritables œuvres d’art. Ils ne se contentent plus de divertir : ils racontent des histoires, transmettent des émotions et abordent des thèmes profonds. Certains titres nous emmènent dans des voyages émotionnels ou visuels, d’autres mettent en lumière des cultures ou des épisodes historiques méconnus. Le jeu vidéo est devenu un outil de réflexion, d’apprentissage et de dialogue culturel.
Les raisons évoquées par Paramount : notamment la fusion avec Skydance et la réorganisation de son pôle télévisuel démontrent que le jeu vidéo, même reconnu, reste vulnérable aux décisions stratégiques d’entreprises dont le cœur de métier n’est plus aligné avec les valeurs ou les attentes du public gamer. Cette fermeture rappelle qu’il reste du chemin à parcourir pour que les acteurs économiques considèrent le jeu vidéo non pas comme un segment accessoire, mais comme une composante à part entière de la culture moderne.
Le jeu vidéo est devenu un espace d’expression artistique, d’éducation, et de lien social. Il touche toutes les générations et transcende les frontières. Pourtant, les structures de diffusion et de reconnaissance doivent encore évoluer pour accompagner cette réalité.
La fermeture de Game One ne se limite pas à une seule chaîne. J-One, spécialisée dans la culture japonaise et les animés, serait également concernée. Paramount Network, autre chaîne du groupe, pourrait subir le même sort. Ces arrêts successifs soulignent un désengagement progressif de la télévision classique face à un public jugé trop « niche », alors qu’il s’agit d’une communauté immense et fidèle.
Cette situation met aussi en lumière l’importance de préserver les archives, les émissions cultes et les contenus produits depuis près de trois décennies. Ces documents constituent un patrimoine culturel et médiatique à part entière. Leur disparition ou leur inaccessibilité serait une perte pour la mémoire du jeu vidéo en France.
Face à cette fermeture, les plateformes indépendantes, les streameurs et les médias spécialisés en ligne reprennent le flambeau. Ils incarnent une nouvelle façon de parler du jeu, plus libre, plus directe, et plus proche des joueurs. Cependant, leur succès ne doit pas masquer la nécessité d’un écosystème médiatique diversifié, où coexistent indépendants et institutions.
La fermeture de Game One marque la fin d’une époque, mais elle doit surtout servir d’électrochoc. Même si le jeu vidéo est aujourd’hui reconnu comme un art et une industrie florissante, il reste à construire un environnement où cette reconnaissance s’accompagne de soutien concret, de médias dédiés, et de valorisation culturelle. Les entreprises ont encore des efforts à faire pour comprendre que le jeu vidéo n’est plus un simple marché, mais un pan fondamental de notre identité culturelle.
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